La soferout et le travail du sofer, de la soferet
Rabbi Ishmaël dit à Rabbi Méïr, qui était scribe : « Mon fils, sois vigilant dans ton travail, car ton travail est œuvre du Ciel. Si tu oublies une lettre ou si tu ajoutes une lettre, tu te trouverais en train de détruire le monde entier. » (Traité Erouvin. 13a)
La soferout :
La soferout est l’activité qui consiste à calligraphier les textes saints de la tradition juive, le Sefer Torah, les Tefillin, la Mezouza, en respectant, scrupuleusement, l’ensemble des lois qui la régissent et qui sont si nombreuses que nous ne les détaillerons pas ici…
Dans le cadre de son activité, le sofer, la soferet (scribe) pourra également être amené à calligraphier la Meguila d’Esther, les ketoubot (actes de mariages) ou les guittin (actes de divorces). Un autre aspect important de cette activité réside dans la vérification et la réparation des parchemins endommagés, si et quand cela est possible. A noter que les parchemins des Tefillin et Mezouzot peuvent faire l’objet d’une vérification mais pas d’une réparation, en vertu du principe « Chelo ksidran » dont nous parlerons plus loin…
Le matériel :
La plume (ou le roseau) :
La plume doit être issue d’un oiseau casher (conforme aux règles alimentaires juives), on a l’habitude d’utiliser une plume d’oie. Le roseau (ou calame) est plus rarement employé car il est plus difficile d’utilisation pour tracer les petites lettres.
L’encre :
L’encre est, généralement, obtenue à partir de noix de galle, d’eau, de gomme arabique, de colle, de sulfate de fer et doit être exempte de produits non cashers.
Le parchemin :
Il doit provenir d’un animal casher, ovin, bovin ou caprin. Les peaux doivent être travaillées et préparées « lichma », c’est-à-dire avec l’intention de les consacrer à la rédaction des textes saints du judaïsme.
Les textes calligraphiés :
Pour le Sefer Torah, on écrit le texte du Pentateuque, les cinq livres de Moïse.
Pour la Mezouza, on copie deux parashiot (passages de la Torah) qui sont les deux premiers paragraphes de la prière « Shema Israël ». (Deut. 6, 4 à 9 et Deut. 11, 13 à 21).
Pour les Tefillin, ce sont quatre parashiot qui sont rédigées, les deux textes qui figurent dans la Mezouza précédés de deux passages de l’Exode (Exode 13, 1 à 10 et Exode 13, 11à 16).
« Lichma » (l’intention) :
Le sofer, la soferet se doit d’écrire les textes « lichma », c’est-à-dire, en ayant une parfaite conscience de ce qu’il ou elle écrit, de l’importance de la tâche qu’il ou elle est en train d’accomplir et en y mettant toutes les intentions requises par notre tradition et les lois qui régissent la soferout. Ainsi, le sofer, la soferet doit scander, à voix haute, tout le texte qu’il ou elle calligraphie.
Dans le même esprit, il ou elle doit prononcer une qédoucha (formule de sanctification) particulière, à chaque fois, qu’il ou elle commence l’écriture d’un texte saint ou avant d’écrire l’un des noms de Dieu.
« Au pied de la lettre »
Selon la tradition juive, les lettres que tracent le sofer et la soferet ont été créées par Dieu lors du don de la Loi à Moïse au mont Sinaï. Ces lettres, lorsqu’elles sont destinées à former un Sefer Torah, des Tefillin, une Mezouza répondent à une graphie complexe : la graphie « STaM » (acronyme de Sefer, Tefillin, Mezouza). Celle-ci est régie par un grand nombre de règles halakhiques (lois juives) codifiant, tout à la fois, l’angle à donner à chaque trait de plume, la forme, la dimension ou l’épaisseur de chaque lettre.
Toutes ces lois doivent être respectées scrupuleusement si l’on veut que les lettres soient cashères (conformes). Si cela n’était pas le cas, le manuscrit n’aurait aucune valeur et serait déclaré passoul (non valable).
De même, si on oublie une seule lettre du texte ou si on écrit une lettre en plus, le Sefer Torah, les Tefillin ou la Mezouza n’auraient aucune valeur.
Le sofer, la soferet devra, enfin, s’appliquer à soigner la beauté de son écriture.
Mouqaf guevil, Hak tokhot et Chelo ksidran, les 3 règles importantes
Il existe trois principes sur lesquels le sofer ou la soferet doit être particulièrement vigilant(e) car leur non-respect entraînerait, là aussi, la déclaration de non-conformité du parchemin.
« Mouqaf guevil » : (« entouré de parchemin »)
Toute lettre doit être placée de façon à ce que, de chaque côté de celle-ci, se trouve du parchemin. Ceci implique que les lettres ne touchent, à aucun endroit, les extrémités du parchemin ; qu’il n’y ait aucun trou dans le parchemin au bord d’une lettre et, enfin, que les lettres ne se touchent, à aucun moment, entre elles.
« Hak tokhot » : (« creuser l’intérieur » de la lettre)
Les lettres doivent, obligatoirement, être formées par l’écriture et jamais par grattage de l’encre sur le parchemin. Il existe des possibilités, dans certains cas et sous certaines conditions très strictes, de réparer une erreur (sauf dans le cas du nom divin qui ne doit, sous aucun prétexte, être effacé) ou de faire disparaître une tache d’encre sur le parchemin par grattage mais ce procédé ne doit, en aucun cas, être utilisé pour former ou transformé une lettre !
« Chelo ksidran » : (Cette règle s’applique uniquement aux Mezouzot et Tefillin)
C’est le principe selon lequel, pour les Tefillin et Mezouzot, toutes les lettres doivent être écrites en suivant l’ordre strict du texte copié. On ne pourra, par exemple, pas écrire la deuxième parasha de la Mezouza avant la première, ou encore, laisser en blanc un mot ou une lettre et les écrire ensuite.
Les deux principes Hak tokhot et Chelo ksidran étant pratiquement impossibles à vérifier à l’œil nu, tout repose sur la confiance dans la compétence et le sérieux du sofer ou de la soferet à qui l’on s’adresse.
« Toute la Torah est un nom de Dieu car il n’y a pas un mot dans la Torah qui ne soit contenu dans le nom de Dieu » (Zohar, Yithro)
Ermeline Rachel, notre Soferet

La soferout est un travail qui demande, tout à la fois, connaissance et respect de la halakha, exigence, rigueur, concentration, patience, honnêteté, humilité… Bref, vous l’avez compris, la liste est longue !
La responsabilité qui pèse sur les épaules du sofer, de la soferet, est importante. Il ne s’agit pas d’avoir un rapport superstitieux à la lettre mais de respecter les textes, l’écriture et une tradition transmise de génération en génération. Comme toute mitsva, elle doit être accomplie avec soin et intention.
Certains aspects concernant la casherout d’un parchemin sont vérifiables, d’autres…pas !
Tout repose donc, en grande partie, sur la confiance que l’on accorde au sofer ou à la soferet… Voilà pour mettre une grosse pression…!
Mais quelle joie lorsqu’on écrit, enfin, son premier parchemin casher, de se dire que l’on va participer activement à l’accomplissement des Mitsvot et à la transmission des textes saints de notre tradition !
Quelle joie quand, après des mois de formation avec la formidable soferet, Jen Taylor Friedman (qui fut la première femme de l’histoire moderne à écrire un Sefer Torah), après de grands moments de doute, de découragement et, heureusement, de regain de confiance et d’optimisme aussi…j’ai reçu, en juillet 2020, ma certification pour l’écriture des Mezouzot !
Le chemin est long et ma formation encore en cours mais je veux, ici, m’engager, solennellement, à être toujours digne de la confiance que vous voudrez bien m’accorder en ayant recours à mes services en tant que soferet.
Soyez assurés de ma volonté d’exercer cette activité dans le plus grand respect de nos valeurs, de nos traditions, de nos textes saints pour que ceux-ci restent vivants et emplissent nos vies d’une étincelle divine…
Merci au rabbin Pauline Bebe pour sa confiance et à tous les membres de la CJL pour leur soutien…
Ermeline Rachel
Ketoubot faites main par Ermeline Vicaire




Ermeline Vicaire a également une activité de sculpture sur bois d’objets judaïca.
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